Mafarma Sanogo
Présidente de l’APAC,
Directrice de la Radiodiffusion du Burkina.

      Mafarma Sanogo a suivi une formation en droit et se destinait à être avocate. Mais, lorsqu’elle a obtenu sa maîtrise, tout en cherchant à être embauchée dans un cabinet juridique, elle a postulé au Ministère de l’Information pour un poste à la Radio Télévision Burkinabé (RTB). Et elle a été choisie.
      Or, depuis toute petite, Mafarma a toujours eu un faible pour la radio. Confiée par ses parents à sa grand-mère veuve, elle a grandi bercée par les émissions de la radio toujours en marche. Elle était même chargée de traduire pour sa grand-mère les émissions en français.
      Donc, quand cette opportunité à la RTB lui a été offerte, elle a rapidement accepté, un peu comme une expérience intéressante. En fait, elle désirait être avocate afin de défendre des causes justes, notamment celle de la femme. Et elle a considéré qu’elle pourrait tout autant aider les femmes via les médias, en diffusant des émissions relatives aux droits des femmes par exemple. La radio était donc pour elle un outil puissant pour réaliser des plaidoyers en faveur des femmes et des enfants. Mme Sanogo avoue cependant qu’il n’est pas toujours aisé de diffuser des émissions en faveur des femmes et que pour cela, elle livre « une bataille quotidienne ». En effet, certains rédacteurs en chef considèrent que ces sujets sont peu « vendeurs ou accrocheurs ». Mais Mme Sanogo refuse toujours de se soumettre ou de baisser les bras. Elle trouve toujours le moyens de faire entendre son opinion. A la tête d'un organe d'information public, elle sait mettre en avant les témoignages de personnes externes capables de critiquer les politiques du gouvernement.

      A peine embauchée à la RTB, Mme Sanogo a rejoint l’APAC, l’ Association des Professionnelles Africaines de la Communication. En 1978, les femmes journalistes représentaient 11% de la profession. Cette proportion n'a guère augmenté puisqu'elles représentent aujourd'hui à peine 15%. Peu nombreuses, elles entendent cependant être une « minorité visible ». Pour Mme Sanogo, il est nécessaire que les femmes s’organisent pour pouvoir mener leur combat. C’est pourquoi elle est aujourd’hui présidente de l’APAC et cherche à inciter les jeunes journalistes à venir militer dans l’association. Dans le journalisme, les femmes sont souvent considérées comme des intruses et ce n’est qu’en étant solidaires qu’ « elles pourront tirer leurs marrons du feu ». Pour une femme, « il ne s’agit pas seulement d’être bonne, il faut être la meilleure !». L’APAC représente donc une force pour les femmes, au niveau du Ministère de l’Information. Elle est consultée pour proposer des amendements sur les projets ministériels. Par ailleurs, Mme Sanogo estime que les femmes journalistes sont plus consciencieuses que les hommes mais qu’elles ont besoin d’un renforcement des capacités car bien souvent, elles ne peuvent pas assister aux formations longue durée, pour des raisons familiales essentiellement. Grâce à l’APAC, elles peuvent suivre des formations et renforcer leurs compétences pour continuer à progresser dans leur métier.

      Mme Sanogo est aujourd’hui directrice de la Radiodiffusion du Burkina, ce qui lui prend énormément de temps. Elle nous avoue que ce n’est pas toujours facile de mener de front une activité professionnelle si prenante et de s’occuper de son foyer et de ses amis. Elle a d’ailleurs été amenée à divorcer car son mari n’acceptait pas qu’elle rentre tard à la maison. Elle doit donc élever sa fille toute seule. En outre, dans la société burkinabé, il est important d’avoir du temps à consacrer à sa famille élargie et à ses amis. Mafarma a donc trop souvent dû choisir entre son travail (qu’elle a toujours privilégié) et ses amies. « Socialement, il y a un prix à payer pour pouvoir travailler ». Au sein de l'APAC, les femmes peuvent donc compter les unes sur les autres et se soutenir. Toutes doivent en effet faire face aux mêmes difficultés dans leur vie sociale et familiale. Mais pour Mme Sanogo, c'est une évidence : la radio est un métier prenant dans lequel on doit s'impliquer avec passion. Chez elle, il y a plus de six postes radio, et quand elle sort, elle ne peut s’empêcher d’écouter la radio dans les restaurants, les cafés… « La radio, c’est un service à feu continu », nous dit-elle.

      Mais elle estime que son travail a porté ses fruits. En effet, depuis qu’elle est au poste de directrice des programmes, les femmes semblent se rendre compte de l’importance des activités médiatiques et appellent pour proposer des sujets. De même, aujourd’hui, les femmes osent s’exprimer en public, alors qu’auparavant, elles osaient à peine prendre la parole au sein de leur foyer. Les femmes se sentent donc plus en confiance face à un micro ou une caméra.
      Mais il reste encore beaucoup à faire. La femme est toujours beaucoup plus sollicitée que l’homme dans la famille. Et lorsqu’une femme reste toute la journée au foyer à laver, préparer à manger, s’occuper des enfants…, on considère qu’ « elle ne fait rien ». Il faut donc valoriser le travail de la femme au foyer. Et la RTB, par la voix de Mafarma Sanogo, peut jouer ce rôle.