Portrait de
Mme Dagué Guèye Ndeye

Présidente Nationale de la Section Féminine de l’ANHMS
(Association Nationale de Handicapés Moteurs du Sénégal)





      Mme Ndeye est née à Mbour sur la Petite Côte en 1963. Dès l’âge d’un an, elle est touchée par une épidémie de poliomyélite qui atteint une de ses jambes et son bassin. C’est grâce à son père qu’elle reçoit des traitements modernes qui s’ajoutent à des soins médicaux traditionnels. A force d’interventions chirurgicales et de kinésithérapie, elle parvient à freiner l’avancée de sa maladie. A l’age de huit ans, Mme Ndeye reçoit son premier appareil orthopédique et intègre l’école primaire.

      En tant qu’instituteur, son père insiste pour qu’elle reste scolarisée et se montre très exigeant pour ses résultats scolaires ainsi que pour ses aptitudes aux tâches domestiques attendues des femmes : la couture, la cuisine et le ménage. Compte tenu de son handicap, il veut qu’elle excelle dès un jeune âge pour ne jamais dépendre de personne. Il l’obligeait à travailler à même titre que ses frères et sœurs, et bien au delà. Adolescence, il reconnaît qu’il lui en demandait même plus. C’est à son père que Mme Ndeye attribue son caractère de « leader » ; il lui apprend à ne jamais voir son handicap comme un frein et à utiliser tous les recours à sa disposition pour vivre avec sa différence.

     


Mme Dagué Guèye Ndeye

      A la mort de son père, elle intègre l’Ecole Normale des Jeunes Filles de Thiès, un centre de formation pour devenir institutrice alors que ses enseignants lui conseillaient une carrière professionnelle plus poussée. C’est pour soulager les contraintes financières de sa mère, veuve depuis peu, que Mme Ndeye s’inscrit à Thiès où elle est boursière. Après trois mois seulement, suite à une visite médicale, est est renvoyée de l’école : le médecin juge que son handicap la rend « inapte à gérer une classe. » « Mes larmes coulaient » nous confie-t-elle. Cette douloureuse expérience marque le début de son militantisme : sa famille et ses camarades de classe la soutiennent dans son combat en faisant grève jusqu’à sa réadmission.

      Mme Ndeye rejoint l’ANHMS de Mbour en 1984 alors que l’association n’a que trois ans. Les années 80 voient la ville se transformer en un pôle touristique de plus en plus important, ce qui permet à l’association de rentrer en contact avec de généreux donateurs allemands et suisses. C’est avec ces financements que Mme Ndeye obtient du matériel orthopédique pour les enfants handicapés de la ville. Aujourd’hui, elle est fière des réalisations de l’association : « Même les villages le plus reculés comptent une représentation de l’ANHMS, ce qui est toujours un défi pour d’autres associations. » Cependant, Mme Ndeye ne se repose pas sur ses lauriers : « Quand je vois des handicapés mendier dans la rue, je me dis qu’il me reste beaucoup à faire. J’ai fait un tout petit peu ou bien j’ai rien fait. »

      En 1994, elle déménage à Dakar. Un don de l’UNIFEM (Fonds de Développement des Nations Unies pour le Femmes) encourage Mme Ndeye à créer une section féminine à l’ANHMS de Dakar. Elle voit le jour en 1996 mais se limitera d'abord à la capitale. En 1998, suite à l’Assemblée Générale, elle s’étend à tous les niveaux régionaux. Dès que la section féminine devient officielle en 1998, les invitations aux conférences internationales, financements et alliances se multiplient. La création de la section féminine de l’ANHMS s’inscrit dans l’activisme féministe du pays qui, depuis ses débuts dans les années 70, a posé des jalons fermes à partir desquels Mme Ndeye mène le combat de l’association. C’est grâce à la création de la section que l’association a bénéficié de lignes de crédits et d’un véhicule neuf en allocation du Ministère de la Femme. La section a également permis à l’ANHMS de se fédérer avec 25 associations nationales de femmes handicapées. Selon la présidente, il n’existe aucun conflit entre la section féminine de l’association et les intérêts de ses membres hommes. Au contraire, au sein de l’ANHMS, les hommes et femmes se complètent et sont liés par leur identité d’handicapés.

      D’après Mme Ndeye, « en tant que piliers du développement africain, les femmes doivent être à la tête des décideurs » - c’est pourquoi elle concentre son travail sur le plaidoyer, la sensibilisation et la scolarisation. La présidente nous rappelle aussi que les femmes handicapées ont des problèmes spécifiques, notamment au niveau de la santé de la reproduction : « les femmes handicapées sont doublement handicapées » dans leurs capacités motrices, mais aussi dans la grossesse qui leur exige fréquemment une césarienne. Elle estime que la sensibilisation des parents est une des tâches les plus importantes de son association car elle appuierait les grossesses à risques, préviendrait contre les maladies handicapantes et encouragerait l’intégration des enfants handicapés dans la vie normale.

      Désormais, elle compte surtout venir en aide aux enfants handicapés car pour elle, « les enfants sont les sans-voix. » En plus de son rôle de présidente de l’ANHMS, Mme Ndeye travaille à l’école Taliboudabou pour enfants handicapés en tant que coordinatrice.

      Pour plus d’informations sur l’ANHMS, vous pouvez visiter leur site, leur blog et le site de la section féminine


Cette page a été réalisée par les membres de l'association Courants de Femmes